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Affaire CAHUZAC : Quels sont les vrais enjeux ?

 

 

Mots clefs : affaire jérôme cahuzac ; eric-dupond-moretti ; fraude fiscale ; blanchiment ; évasion fiscale ; ministère des finances ; politico-financier ; droit pénal

 

 

Cela n'aura échappé à personne, Jérome CAHUZAC, ancien ministre d'Etat (Francois HOLLANDE lui avait confié le ministère des finances le 16 mai 2012), était condamné à trois ans de prison ferme et cinq ans d'inéligibilité par la 32 ème chambre du Tribunal de Grande Instance de Paris.

 

La décision était prononcée le 8 décembre 2016. Les qualifications légales visées au jugement étaient fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale. Le même jour, il frappait d'appel cette condamnationSon procès s'est ouvert ce matin devant la Cour d'Appel de Paris. Explications !

 

 

Au delà des arguties juridiques liées au principe de non bis in idem, il faut marteler une chose : Jérome CAHUZAC risque l'incarcération.

 

 

En effet, l'on doit rappeler qu'il avait écopé d'une peine de trois années d'emprisonnement ferme en première instance.

 

 

Il s'agit d'une peine particulièrement lourde et pour un homme au casier vierge et pour ce type de dossiers politico-financiers.

 

 

Ce que vous devez comprendre, c'est que cette peine, en vertu de l'article 723-15 du Code de Procédure Pénale, n'est pas aménageable.

 

 

C'est à dire que si par extraordinaire la Cour d'Appel de Paris venait à confirmer le verdict de première instance, Jérome CAHUZAC n'aurait d'autre alternative que de se constituer prisonnier.

 

 

Tout l'enjeu de sa défense (confiée à Me Eric DUPOND-MORETTI) sera donc de ramener la peine d'emprisonnement à deux ans, durée à partir de laquelle celle-ci est aménageable pour les non récidivistes (voir notamment l'article 723-15 du Code de Procédure Pénale ainsi que mon billet sur la récidive).

 

 

L'enjeu est donc de taille car les anciens ministres incarcérés se comptent sur les doigts d'une main (voir billet de Bfmtv).

 

 

Il est fort probable que Jérome CAHUZAC soit condamné, ce dernier ayant reconnu publiquement les faits (voir billet du Figaro)

 

 

Le risque de confirmation de cette décision est d'autant plus grand que la volonté de « faire un exemple » peut être une tentation.

 

 

Ainsi et dans une autre affaire, Thomas THEVENOUD, ancien secrétaire d'Etat, était condamné le 31 janvier 2018 par la Cour d'Appel de Paris à la peine d'un an d'emprisonnement avec sursis ainsi qu'à trois ans d’inéligibilité, du chef de fraude fiscale.

 

 

Les juges avaient aggravé les peines prononcées par le tribunal correctionnel de Paris qui l’avait condamné le 29 mai dernier à trois mois de prison avec sursis et un an d’inéligibilité.

 

 

Sa condamnation a donc été quadruplée en appel !

 

 

En tout état de cause, la défense de Jérome CAHUZAC ne manquera surement pas de relever les axes suivants (en tout cas c'est ce que je ferais à sa place!) :

 

 

Premièrement, Jérome CAHUZAC, malgré des dénégations originaires, a exprimé un repentir tout particulier (lien).

 

 

Deuxièmement, Jérome CAHUZAC s'est acquitté de la totalité de son redressement fiscal sans sourciller, soit environ 2,5 millions d'euros (lien).

 

 

Troisièmement, il s'agit d'un ancien ministre brillantissime dont la carrière politique fût détruite par cette affaire.

 

 

Quatrièmement, les faits les plus récents de fraude fiscale remontent à 2010, soit à près de huit ans.

 

 

En espérant que ce billet vous aura permis de cerner quels sont vraiment les enjeux qui pèsent sur les épaules de cet ancien ministre déchu,

 

 

Votre bien dévoué,

 

Nicolas PAGANELLI

Avocat au Barreau de Seine-Saint-Denis